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Emission du |
09/09/08 |
Thème |
Les cyclones |
Transcription
Nous sommes dans une conjoncture de cyclones; il n’y en a pas en vue pour le moment, tout le monde attend Joséphine, mais il semble qu’elle ne viendra pas par ici. Pour ceux qui veulent vérifier cette information, il y a eu deux sites que l’on peut consulter:
www.nhc.noaa.gov qui donne la position du cyclone et une projection de son trajet dans les 3 ou 5 jours,
www.goes.noaa.gov qui donne la photo-satellite permettant de voir les nuages qui font partie du système du cyclone.
Si nous n’avons pas de cyclone en vue, nous venons d’en subir quatre coup sur coup et il s’agirait de parler un peu des dégâts qu’ils ont occasionnés. Bien sûr tous les médias donnent des informations là-dessus, je n’ai donc pas la prétention de donner un état des lieux exhaustif, ce qui n’est du reste pas la fonction de cette émission. Nous allons parler de dégâts par rapport à des personnes ou à des groupes qui sont proches de nous.
Ainsi, en deux ou trois fois nous avons eu comme invité Abner Septembre de l’APV (Association des Paysans de Vallue, dans la commune de Petit Goâve). Abner a envoyé des informations sur les dégâts causés par Fay et Gustave à Vallue; je n’ai pas d’informations sur d’éventuels dégâts causés par Hanna ou Ike.
De même, l’année dernière, nous avions reçu des représentants de trois associations locales venant de trois localités qui ont en commun leur proximité de la Rivière Grise: Duvivier, situé dans la partie basse de la Plaine du Cul-de-Sac; Dumay, situé plus en amont, au niveau du point où la Rivière Grise débouche dans la plaine et où se trouvait le barrage dénommé Bassin Général; Belle Fontaine, située tout en haut dans la montagne. C’était après le cyclone Noël; ils nous avaient parlé des dégâts causés par ce cyclone et nous avions essayé d’envisager quelles mesures préventives pouvaient être prises.
Cette année, après que j’aie vu à la télé le niveau que la rivière avait atteint au niveau du pont de Tabarre, je suis allé sur le terrain. J’ai commencé par prendre des photos qui permettent de comparer le niveau de l’eau ce jour-là avec le niveau en temps normal sur des photos prises antérieurement. Le lendemain, j’ai visité Duvivier, où la destruction des berges a provoqué de grandes pertes, et, le surlendemain, Dumay, où la situation est différente. Là les alluvions entraînées par la rivière ont relevé le niveau du lit du cours d’eau qui se retrouve au même niveau que le terrain où est construit le village. Comme on peut se l’imaginer, à chaque petite crue le village est inondé et couvert de boue. Une de mes photos, publiée dans Haïti en Marche montre ne maison à moitié enfouis dans la boue. Bien sur, je n’ai pas été à Belle Fontaine; il y a quelques années, la montée là-haut, par temps sec, m’avait pris sept heures de marche! ce n’est plus de mon age. Nous avions pensé faire une émission comme celle de l’année dernière, un nouveau cyclone ne l’a pas permis.
Un autre groupe que nous avons reçu à cette émission c’est le Forum Agricole Goâvien un regroupement d’associations d’irrigants dans la zone de Petit Goâve. Avant que les cyclones ne nous tombent dessus, nous avions prévu de faire une seconde émission car la première avait eu un tel impact sur la relance des activités du regroupement que le coordonnateur voulait tirer parti du momentum. Les cyclones n’ont pas permis de réaliser l’émission, mais nous savons que eux aussi ont subi des dégâts, sans doute pas aussi graves qu’à Cabaret ou aux Gonaïves, la ville martyre, mais ils ont quand même enregistré des pertes.
Ceci dit, il faut réaliser que, il y a quatre mois, nous vivions une conjoncture marquée par les émeutes de la faim qui ont provoqué la chute du gouvernement, et depuis lors on ne parlait plus que de la relance de la production agricole, et voilà que quatre cyclones nous tombent dessus!
Nous avons eu récemment une émission avec l’agronome Gary Mathieu, Coordonnateur de la CNSA (Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire) et il nous disait que la CNSA produit régulièrement des publications informant sur la situation alimentaire du pays. La dernière publication couvre la période du 25 juillet au 25 août; elle ne tient donc pas compte de l’impact du cyclone Gustave. Ce dernier Flash Info # 34 fait des recommandations au gouvernement, aux bailleurs de fonds, etc:
-
intensifier les actions de réponses à la crise alimentaire
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renforcer les programmes de développement agricole
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renforcer la coordination, suivi, évaluation des programmes de développement et les réponses aux crises.
Encore une fois, nous n’allons pas entrer dans le détail des dégâts, mais je voudrais citer une dépêche de Agropresse: les dernières tempêtes tropicales qui se sont abattues sur Haïti ont provoqué des pertes considérables dans le secteur agricole, dégâts particulièrement considérables à l’Arcahaie, l’une des principales zones de production de banane du pays, pertes importantes dans la plaine des Cayes, la plaine du Cul-de-Sac, etc.
La dépêche ne mentionne pas l’Artibonite. Un de mes collaborateurs, qui a de la famille aux Gonaïves, s’est rendu là-bas. Il doit être une des dernières personnes à passer sur le pont de Montrouis, à l’aller, et sur le pont de Mirebalais, au retour. Il m’a décrit ce qu’il a vu en traversant la plaine de l’Artibonite. Depuis la ville de Lestère jusqu’aux montagnes qui dominent Marchand-Dessalines, il n’y a qu’une seule nappe d’eau, toute la plaine est inondée. Autrement dit, toutes les cultures sont perdues, mais en plus nous ne savons pas quels dégâts il y a au niveau des infrastructures d’irrigation. C’est une véritable catastrophe.
Quand on pense qu’il y a actuellement un projet de réhabilitation du système d’irrigation de la plaine de l’Artibonite, un programme d’un montant de US$ 46 millions, financé par la BID, et que tout ce qui a déjà été fait peut avoir été détruit, on ne sait plus que dire. Il n’est plus que d’attendre la baisse des eaux pour voir comment la production pourra éventuellement reprendre. Et il n’y a pas que l’Artibonite, j’ai appris que dans la zone de Hinche c’est la même chose, tout est sous l’eau.
C’est excessivement grave, et, comme je l’ai déjà dit, on ne sait plus que dire. Alors il y a la question fondamentale.
Bien sur, il s’agit de catastrophes naturelles. Nous parlerons une autre fois de la responsabilité de l’homme dans ce déchaînement des éléments. Il y a toujours eu des cyclones, mais il semble qu’il y ait un dérèglement. Un simple exemple, en 1954 le cyclone Hazel, le premier que j’aie vécu en pleine connaissance, est passé au mois d’octobre; cette année Hanna, un autre H, est arrivé fin août – début septembre; les cyclones sont plus rapprochés. Mais laissons ce thème du dérèglement climatique pour une autre occasion. Nous en avons déjà parlé, nous y consacrerons une autre émission.
Je disais que les cyclones sont des phénomènes naturels; nous ne pouvons rien faire pour contrôler leur force, mais ne pouvons nous rien faire pour que les dégâts qu’ils occasionnent ne soient pas aussi immenses que ceux que nous vivons aujourd’hui?
On en parle beaucoup. Jeanne, il y a quatre ans, a fait les dégâts que nous connaissons, et tout le monde demande: qu’a-t-on fait pour éviter le même désastre? Et quatre ans après, les dégâts sont pires. J’ai reçu d’une amie un article de l’agronome William Michel; d’après lui, la première averse à avoir touché les Gonaïves était Hazel, l’eau avait atteint un niveau de 1,20 mètre; en 2004, 50 ans plus tard, l’eau atteignait un niveau de 3 m; quatre ans plus tard le niveau de l’eau était de 6 m. La dégradation de l’environnement fait qu’il y a de plus en plus d’eau à partir en ruissellement.
Y a-t-il quelque chose que l’on puisse faire? Dans la dépêche d’Agropresse il est dit que la mauvaise gestion du foncier est l’une des causes majeures de la vulnérabilité des espaces cultivables aux catastrophes naturelles. La dépêche cite l’agronome Serge Michel Pierre-Louis, qui est venu à ce micro prler du décret-cadre de l’environnement, spécialiste en environnement et engagé actuellement dans le GREF (Groupe de Recherche en Etudes Foncières): la densité élevée de la population conduit à une utilisation abusive des ressources forestières et du sol.
Il y aurait donc quelque chose à faire au niveau de la gestion du foncier. Le Premier Ministre Pierre-Louis a parlé d’aménagement du territoire: définir quelle zone est propre à l’agriculture, quelle zone à l’habitat, etc. Effectivement nous devons cesser de faire n’importe quoi n’importe où, de faire de l’agriculture dans les mornes avec pour résultat que toute la terre s’en va à la première pluie.
On parle d’aménagement des bassins versants, ce qui me ramène à l’article de William Michel. Il demande si l’Etat peut traiter les 31 bassins versants critiques pour éviter ce genre de catastrophes, et sa réponse est: non! car la mise en valeur reviendrait trop cher. Selon lui, «il faut un minimum de US$ 1.000 pour conserver 1 hectare de montagne et un minimum de US$ 100 par an pour les travaux d’entretien. Il faut un crédit de US$ 800 à 1.000 à l’hectare chaque année pour encourager la production de cultures vivrières à l’intérieur des terres plantées en verger lesquelles commenceront à être rentables après cinq années d’entretien et de surveillance. Cela ferait environ un crédit de départ de US$ 2.000 la première année et un crédit de US$ 1.100 l’an pour les 5 années à venir. Rien que pour le bassin versant de la Quinte, le crédit à la production et à la valorisation des terres coûterait US$ 2.000 x 140.820 ha – US$ 281.640.000 la première année et US$ 140 millions à l’année pendant un minimum de 4 ans. Haïti n’aura jamais les moyens de cette politique.»
Donc, on ne fait rien? William vient avec une proposition: il faut construire des modèles sur des échantillons d’un centième des bassins versants et montrer à la population ce qu’elle atteindrait en répétant ces mêmes travaux sur tout le reste du bassin versant. Cela nous ramène à la méthode des jardins de démonstration.
Appel |
L’argent ne devrait pas être un obstacle; l’argent n’est qu’un outil. |
Oui mais il y a un problème de valeurs, car ces moyens que nous n’avons pas ne sont rien devant les dépenses d’armement de certains pays, et quand on rentre dans ce genre de comparaison, on a le vertige.
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Emission du |
16/09/08 |
Thème |
Les cyclones (2) |
Transcription
La semaine dernière, j’avais commencé l’émission en disant que nous étions dans une conjoncture de cyclone ; aujourd’hui nous sommes dans une conjoncture de mauvais temps, même si les cyclones continuent de dominer toutes nos préoccupations. Mauvais temps, car, comme je l’ai dit également, la semaine dernière, même si on voit beaucoup de pluie, ce n’est pas un cyclone. Je n’ai pas eu le temps de consulter le site, mais la dame du Service de Météorologie l’a dit, il n’y a pas de cyclone, c’est une onde tropicale qui passe sur Haïti. C’est peut-être un déluge, mais ce n’est pas un cyclone.
Pour aujourd’hui, j’avais deux invités, mais ils ne sont pas là. J’ai du faire un gros effort pour venir, je ne voulais pas que mes invités arrivent et que je ne sois pas présent pour les recevoir, mais je m’imagine qu’ils n’ont pas pu passer.
Mes deux invités étaient les agronomes Harmel Cazaeu et Parnell Dimanche, tous deux de la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA). On se souvient que nous avions eu une émission, le 12 août, avec l’agronome Gary Mathieu, Coordonnateur de la CNSA ; il était accompagné de l’agronome Jean-Marie Binette, que nous connaissons déjà. A l’époque, ce qui faisait l’objet de l’émission, c’était la relance de la production agricole qui était dans toutes les conversations depuis les émeutes du mois d’avril.
Je voulais que l’agronome Mathieu pour qu’il nous dise ce qui était prévu et ce qui se faisait, au niveau de la CNSA, pour relancer la production agricole, de manière à ce qu’il y ait une plus grande quantité d’aliments produits dans le pays en vue de réduire l’insécurité alimentaire. Nous ne savions pas que le plan d’action de la CNSA serait remis en question par les quatre cyclones qui se sont succédés. L’agronome Mathieu était avec nous le 12, les cyclones ont commencé à déferler le 20.
Tout est donc remis en question et la problématique d’aujourd’hui est bien plus compliquée qu’elle ne l’était au moment de l’émission ; il ne s’agit pas seulement d’une relance de la production agricole, il faut commencer par évaluer les destructions de la structure de production, qu’il faudra remettre en état, avant de pouvoir entreprendre la relance de la production.
Pour l’émission d’aujourd’hui, l’agronome Mathieu ne comptait pas venir personnellement ; il se faisait remplacer par deux de ses collaborateurs. Ils ne sont pas présents et je peux le comprendre ; je ne sais pas s’ils écoutent. En tout cas je les salue, espérant que nous pourrons avoir cette émission une autre fois, « si Dye kontan », si le temps le permet.
J’avais prévu de passer cinq points en revue.
Le premier point, c’est le bilan. Qu’y a-t-il comme dégâts ? qu’y a-t-il comme destructions ? qu’y a-t-il comme pertes ? et qu’est-ce qui est prévu pour réparer les dégâts ? Le bilan ne peut pas être achevé rapidement, mais je crois qu’on est en train de préparer une première synthèse. Je crois même que la semaine dernière, le Ministre de l’Agriculture avait présenté un premier bilan provisoire.
Il y a beaucoup de monde qui travaille à ce bilan, à cette évaluation des dégâts, non seulement au niveau du gouvernement (MARNDR, CNSA …) mais aussi au niveau des institutions internationales qui sont prêtes à envoyer des experts pour aider le gouvernement à évaluer les dégâts et les coûts prévisibles de la remise en route de la production.
J’ai trouvé dans Agropresse une information selon laquelle les pertes pour le secteur agricole sont évaluées à $ 23 millions. Je viens de trouver cette dépêche et je n’ai pas eu le temps de la lire ; et, comme un malheur ne vient jamais seul, dans ma précipitation pour venir malgré la pluie, j’ai oublié mes lunettes ; je ne suis donc pas totalement aveugle, mais je ne peux pas vous lire la dépêche.
Appel de Gary Mathieu : il a eu un contact avec les agronomes Cazeau et Dimanche, ils sont effectivement pris dans un gigantesque blocus. Il profite pour corriger le chiffre de $ 23 millions, car il faut comptabiliser les dégâts au niveau des infrastructures et pas seulement les récoltes perdues ; provisoirement on parle de $ 150 millions, soit six fois plus que le chiffre avancé par Agropresse.
C’est donc le premier point que je voulais traiter. Si mes invités peuvent venir la semaine prochaine, ils pourront sans doute nous donner une évaluation plus proche de la réalité.
Le deuxième point concernait les mesures d’assistance immédiate. Il s’agit là de la première action à entreprendre. Il y a des personnes qui n’ont rien à manger ; il y a des personnes qui n’ont où se loger ; il y a eux qui ont tout perdu, leur maison, leurs biens ; il faut donc faire quelque chose pour tout ce monde.
Il y a une assistance qui vient de l’extérieur ; il y a un mouvement de solidarité. Avant hier, on a eu ce marathon au Parc de la Canne-à-sucre ; je viens d’entendre Villette annoncer qu’un autre marathon serait organisé à Miami. C’est donc un effort pour collecter de l’argent, des aliments, des vêtements, tout ce qu’on peut trouver, car les sinistrés ont tout perdu.
Bien sur, ce n’est pas quelque chose qui concerne directement la CNSA ; mais je pensais à traiter ce point pour avoir une vision globale de la situation.
Le troisième point m’intéresse particulièrement ; il s’agit de ce qui peut être fait pour permettre que les personnes frappées puissent reprendre, le plus vite possible, un fonctionnement normal. On pense à certains types de travaux que ces personnes pourraient exécuter et pour lesquels elles seraient rémunérées.
C’est une façon, pour ceux qui ont tout perdu, pour les paysans qui ne peuvent reprendre leur travail, de trouver un job qui leur permette de se faire un peu d’argent pour pouvoir se procurer ce dont ils ont besoin, une façon aussi de ne pas froisser la dignité de ces personnes. Pour moi c’est important. Ces personnes ont certes tout perdu, mais leur donner tout simplement, leur faire la charité, me dérange.
La semaine dernière j’ai participé à une réunion du Réseau de Sauvegarde de la Forêt-des-Pins. Cette zone a connu aussi beaucoup de dégâts, mais on n’en parle pas. Plusieurs personnes l’ont signalé ; tous les regards sont fixés sur les Gonaïves, Cabaret, et il est vrai que la situation y est catastrophique, mais ce ne sont pas les seules zones touchées. A la Forêt-des-Pins, il y a des routes coupées, ainsi on ne peut accéder à la Visite par le sud, il y a des maisons détruites, il y a du bétail emporté, il y a des jardins dévastés. Au cours de cette réunion, nous nous disions que certes l’assistance d’urgence est la première chose à faire mais qu’il faut aussi veiller au respect de la dignité des personnes, qu’il faut donc trouver des travaux pour lesquels ces personnes seraient rémunérées, ce qui leur permettrait de recommencer à fonctionner comme des citoyens à part entière.
Ce n’est rien de nouveau. J’ai trouvé de vieux documents de la CNSA qui en parlent. C’est ce qu’on appelle les travaux à haute intensité de main-d’œuvre (HIMO). On se souvient qu’il y avait, qu’il y a même encore, le « food for work ». C’est une organisation du travail où les personnes participent à l’ouverture de routes, à la construction de murs secs, etc, et sont payées en nourriture. Je n’ai jamais beaucoup aimé cette pratique, car j’estime qu’elle ne respecte pas la dignité des personnes. Dans un de ces documents de la CNSA, datant de 1996, il est dit que le « food for work » est acceptable quand il n’y a pas moyen de faire autrement, mais qu’en général le « cash for work » est préférable.
De quels travaux s’agit-il ? Durant la période dite « du coup d’Etat » (1992-1994), on a fait des gens travailler à n’importe quoi ; l’essentiel était de leur permettre d’avoir un peu d’argent. Ce n’est pas ce dont il s’agit ici. Nous voulons parler de la réalisation de travaux d’infrastructures utiles et durables : routes, systèmes d’irrigation, structures de conservation des sols etc ; de cette façon, non seulement on fournit une aide aux personnes, mais on fait aussi des investissements dans la production agricole, le transport, etc.
Avec le quatrième point on rentre directement dans le domaine de compétence de la CNSA ; ce sont les mesures de relance de la production. Je ne vais pas m’étendre là-dessus maintenant, espérant que la CNSA pourra venir nous en parler.
Le cinquième point ne relève pas de la compétence de la CNSA ; il s’agit des mesures à prendre pour qu’une telle situation ne se renouvelle pas. Quand on entend parler les Gonaïviens, ils vous disent : il y a quatre ans, le cyclone Jeanne a fait les dégâts que l’on connaît, et on n’a rien fait pour que cela ne se reproduise pas. Dimanche, j’étais à une réunion, et une des personnes présentes, un ingénieur, originaire des Gonaïves, nous disait qu’après le passage de Jeanne, il avait écrit un article pour expliquer et faire des recommandations. Il a relu l’article, suite au passage de Hanna et consorts, et ce qu’il avait écrit à l’époque était encore valable, quatre ans après !
Est-ce que cette fois-ci on va faire quelque chose ? J’en ai parlé rapidement la semaine dernière en mentionnant un article de l’agronome William Michel. En gros, quand on parle de ces mesures, il s’agit essentiellement de ce qu’on appelle l’aménagement des bassins versants. J’ai cité les chiffres avancés par l’agronome William Michel, et j’ai même fait une erreur, car il ne parlait pas de $ 281 millions, mais bien de $ 281 milliards, et William Michel a raison de dire qu’Haïti ne disposera jamais de cette somme.
La semaine dernière j’avais posé la question : ne peut-on donc rien faire ? William Michel répond qu’il y a des choses que l’on peut entreprendre au niveau de l’aménagement des bassins versants, et j’avais fait la comparaison avec les jardins de démonstration. Nous venons de parler de travaux à haute intensité de main-d’œuvre qui pourraient permettre de mettre en place des infrastructures utiles et durables, c’est aussi à cela que je pensais et nous allons chercher un spécialiste pour en parler.
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Bernard |
Cet après midi a commencé sous un mauvais signe; quand j’ai vu qu’il allait pleuvoir, je me suis demandé si mes invités allaient pouvoir venir ; et, de fait, en arrivant, je ne les ai pas trouvés. J’avais cependant une chance ; en effet, ce matin j’ai reçu d’Alain un document : Evaluation rapide des dégâts sur les périmètres concernés par le PATRAI. J’avais donc la possibilité, au cas où mes invités ne viendraient pas, de présenter ce document ; mais, pendant que je me préparais, mes invités sont arrivés. Il s’agit des agronomes Harmel Cazeau et Parnel Dimanche de la CNSA. Ce sont eux qui devaient venir la semaine dernière et, comme on le sait, n’avaient pas pu passer à travers la circulation. Aujourd’hui nous avons encore mauvais temps ; avant de venir j’ai consulté le site noaa ; il y a effectivement une grosse masse nuageuse sur Haïti, la République Dominicaine et Porto Rico, et ces nuages ont une forme circulaire qui fait penser à un cyclone, mais ce n’en est pas un ; nous avons du reste entendu le bulletin météo qui le confirme. Nous allons donc faire l’émission prévue pour la semaine dernière. Nos invités sont deux agronomes de la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA). Nous avons eu une émission avec le coordonnateur de la CNSA, l’agronome Gary Mathieu ; c’était le 12 août ; à l’époque on ne parlait que de la relance de la production agricole. Une semaine après, les cyclones ont commencé à nous tomber dessus créant une situation bien plus compliquée. Nous voulions donc avoir de nouveau la CNSA pour savoir où elle en est dans cette nouvelle conjoncture. Comme je l’ai dit la semaine dernière, nous voulions parler de bilan des dégâts, de l’aide d’urgence, des mesures à prendre pour permettre aux victimes de revenir sur le marché du travail, et surtout de la relance de la production. Alors, messieurs, qu’en est-il ? |
Cazeau |
Avant d’entrer dans le sujet, nous voulons nous excuser pour la semaine dernière ; malgré tous nos efforts, nous n’avons pas pu venir. Nous prenons aussi un moment pour présenter nos sympathies à toutes les victimes des cyclones. |
Dimanche |
Avant de parler l’évaluation des dégâts, nous voulons aussi présenter nos sympathies aux victimes. Il faut commencer par voir le contexte dans lequel se situe Haïti de par sa situation géographique dans une zone de perturbations où notre niveau de vulnérabilité fait qu’à chaque cyclone nous sommes terriblement touchés. |
Bernard |
Tu s parlé de vulnérabilité. J’ai participé, l’année dernière, à un atelier du Ministère de l’Environnement sur la mise sur pied d’un observatoire de la vulnérabilité, ONEV ; puis je n’en ai plus entendu parler. J’ai rencontré récemment Ronald Toussaint, qui était un des organisateurs de l’atelier. Il m’a dit que le rapport de cet atelier était en phase d’achèvement. Je crois que je vais devoir le relancer, car je pense que c’est un outil qui peut être aussi utile que les bulletins météo. |
Cazeau |
De juin à novembre, nous sommes dans la saison cyclonique et c’est notre situation qui nous rend d’autant plus vulnérables. On voit que les cyclones frappent d’autres pays plus fort que nous ; nous, nous n’en recevons qu’un souffle et nous sommes KO. |
Bernard |
C’est même plus grave, le cyclone peut ne même pas nous toucher ; Jeanne, Hanna et Ike sont passés au large d’Haïti, nous étions dans le rayon des nuages qui les accompagnaient, alors que Ike a traversé Cuba de bout en bout ... |
Cazeau |
… et les dégâts à Cuba sont moins graves. Tu as parlé d’observatoire, c’est un mot qui nous est cher. A la CNSA nous nous occupons de sécurité alimentaire, et nous savons qu’elle est transversale, qu’elle touche à toute une série de secteurs. Nous aussi nous croyons qu’un observatoire est un moyen de recueillir suffisamment d’informations, de données, pour anticiper un événement, de sorte que nous pouvons alerter les décideurs. De même qu’il y a un observatoire de la vulnérabilité, nous avons un observatoire de la sécurité alimentaire. |
Dimanche |
En Haïti, on a à faire face à des chocs : sécheresse, dépressions tropicales avec inondations. L’observatoire est là pour recevoir un ensemble de données recueillies par les responsables déployés dans tout le pays ; nous les analysons, nous les traitons et les sortons sous forme de publications. |
Bernard |
J’aime bien que vous ayez expliqué ce qu’est un observatoire car pour moi, au départ, il y avait une certaine confusion. Comme je l’ai déjà dit ici, j’ai fait toutes mes études classiques au séminaire, à l’ombre de l’observatoire qui était au sommet du bâtiment, donc pour moi un observatoire était une structure physique, alors qu’il s’agit d’une structure virtuelle, d’un réseau d’informateurs. Et c’est là que je vais embêter quelques personnes. Autant que je sache, la crise alimentaire qui a causé les émeutes de la faim, avait été annoncée dans un de vos bulletin. Est-ce que les décideurs ont pris leçon ? |
Cazeau |
La CNSA anticipe. Nous avons les alertes précoces. Et, comme tu l’as dit, depuis janvier nous avions annoncé la crise qui allait déboucher sur les émeutes de la faim. Mais nous avons également annoncé que la saison cyclonique allait être très active par rapport à notre degré de vulnérabilité. Certes, la pluie aurait pu être bénéfique pour les cultures, mais le degré de dégradation de l’environnement joue contre nous. |
Bernard |
Comment saviez-vous que la saison cyclonique allait être très active ? êtes-vous des prophètes ? |
Dimanche |
Nous ne sommes pas des prophètes, mais il y a des prévisions. Nous sommes reliés au centre de météorologie, qui publie les informations climatiques, et nous travaillons avec FewsNet qui a un système très avancé d’alerte précoce. Nous recevons donc régulièrement des informations. Dans le bulletin de juillet, nous avions présenté des scénarios et le scénario pessimiste devait alerter le pays du niveau du choc que l’on pourrait subir cette année. La saison n’est pas finie ; nous sommes en septembre ; il nous reste encore deux mois au cours desquels nous aurons peut-être à faire face à d’autres chocs. |
Bernard |
Je l’ai dit à ce micro ; le premier ministre avait parlé de 17 cyclones prévus. On en a eu 10, si les 7 qui restent sont du même type, on peut fermer le pays et jeter la clé à la mer. |
Cazeau |
Je vais te dire que les cyclones à venir n’ont même pas besoin d’être du même type. Vu l’état actuel de notre environnement, n’importe quelle petite frappe peut être dévastatrice, car le sol est déjà saturé. Il y a des mesures à prendre, mais ce sont des mesures à long terme, et c’est là le problème. Il faut que tout le monde se serre la ceinture et que l’on prenne des mesures structurelles. |
Dimanche |
C’est comme si tu as un malade dont le système immunitaire est déficient, la plus petite grippe peut l’emporter. |
Bernard |
Vous n’êtes pas encourageants. |
Cazeau |
Je pense que nous sommes arrivés au moment de dire ce qui a été fait. Quand on a un cancer, il faut le traiter. Il y a les mesures palliatives, pour soulager les victimes, mais il y a des mesures d’envergure à prendre. Les cyclones sont passés ; tous les secteurs commencent par faire les bilans ; mais après, il faut évaluer les pertes et ce que cela représente financièrement. La CNSA, à la demande du MARNDR, a mis sur pied une coordination des évaluations particulièrement dans le secteur agricole. Ce travail est encore en cours ; la semaine prochaine nous analyserons et traiterons les données recueillies de sorte que, d’ici la fin de la semaine prochaine, nous aurons un rapport finalisé. Mais nous avons déjà les premières estimations. |
Dimanche |
La CNSA ne le fait pas de façon isolée. Nous réunissons tous les partenaires, les Nations Unies, la FAO, les ONG humanitaires, les organisations de la société civile, les organisations de base, et c’est leur appui qui permet d’arriver sur le terrain en dépit des difficultés. Nous avons aussi fait des survols pour avoir une vision de la réalité. |
Cazeau |
Notre agriculture était déjà malade, après ce coup, elle est à genoux. Les cultures sont frappées ; 70 % des plantations de haricot, qui étaient dans une phase sensible, sont détruits. Même chose pour le maïs, surtout dans le sud ; l’eau a balayé les plantations. Dans la vallée de l’Artibonite, qui est # 1 pour la production de riz, une partie était inondée par les pluies, et voilà qu’on a du lâcher l’eau du barrage de Péligre qui était trop chargé. |
Bernard |
C’est ce qu’on a vécu en 98 lors du cyclone George. |
Cazeau |
Le riz a besoin d’eau, on ne peut pas dire encore ce qui est perdu. |
Bernard |
Oui, le riz a besoin d’eau, mais il arrive un moment où il faut drainer, sinon on perd la récolte. |
Cazeau |
On évalue les pertes à 20 – 30 %, mais ce sera peut-être davantage. |
Dimanche |
Pour l’Artibonite, avec un survol, on a pu voir beaucoup de plantations inondées, mais il y a des zones où l’eau a commencé à baisser et le riz reprend. A Marchand, Pont Sondé, on a des localités avec des plantations drainées. Autrement dit, les évaluations peuvent varier après quelque temps. Mais il ne faudrait pas que d’autres pluies viennent faire la situation empirer. |
Cazeau |
Un secteur très frappé, c’est l’élevage. On estime que 100.000 têtes de bétail sont perdues ; cela fait beaucoup d’argent. Un autre secteur, c’est la pêche qui a perdu beaucoup d’équipement. |
Dimanche |
Nous savons que le MARNDR avait beaucoup investi dans la pêche, avec les dispositifs de concentration de poissons (DCP). Mais ces structures sont fragiles, elles sont détruites à 80 %. |
Bernard |
Il y a autre chose. On dit que les alluvions emportées par l’érosion détruisent l’environnement marin et font fuir les poissons. Avec tout ce qui est descendu ces jours-ci, je pense à la Rivière Grise que j’ai observée, est-ce que là aussi il n’y a pas un choc ? |
Cazeau |
Tu as parlé de dégâts, mais ensuite il faut évaluer les pertes, et il y a comme un phénomène en cascade. Tu parles des alluvions qui font fuir les poissons et les pêcheurs, qui étaient déjà mal équipés, ne trouvent plus rien. |
Dimanche |
Bernard a soulevé un problème environnemental sérieux. Les alluvions peuvent aussi perturber l’éco-système des mangroves dont on connaît l’importance dans le cycle de reproduction des poissons et des crustacés. |
Bernard |
On a parlé des pertes dans la production végétale et animale ; la prochaine étape, c’est quoi ? |
Cazeau |
Avant d’aborder la prochaine étape, nous devons parler des infrastructures agricoles, systèmes d’irrigation, routes agricoles, routes en général. On n’en avait déjà pas beaucoup et ce qu’on avait a été partiellement détruit. |
Bernard |
A-t-on une idée du degré de destruction ? par exemple dans l’Artibonite ? |
Cazeau |
On a commencé. Le travail de PATRAI, que tu as là, est un début au niveau des systèmes d’irrigation. |
Bernard |
Oui, mais PATRAI ne parle que de petits systèmes ; je te parle de grands système, par exemple dans l’Artibonite. Imagine-toi qu’il y a de gros investissements déjà faits dans le cadre du Programme d’Intensification Agricole (PIA). |
Cazeau |
C’est dans cette phase que nous sommes. Nous avons besoin de spécialistes en génie rural pour évaluer les pertes en termes financiers. D’ici la semaine prochaine nous aurons des données. Tout cela vient aggraver la situation. Nous avons un environnement on ne peut plus dégradé ; on a des systèmes d’irrigation endommagés. Il ne reste plus que les mornes où les gens vont pouvoir travailler, ce qui va les rendre encore plus vulnérables et dangereux. Il y a donc des choix douloureux à faire. C’est le plan d’aménagement du territoire qui s’impose. |
Bernard |
Il y a le plan d’aménagement du territoire, mais il y a aussi ce dont nous parlions vendredi : la densité de la population. C’est une question que je soulève depuis longtemps. Tu peux faire tous les plans d’aménagement que tu veux, tu peux décider de faire une réforme agraire, tans que tu auras cette densité de population, tu ne peux rien faire. Il faut faire partir une partie de la population agricole vers d’autres secteurs. |
Cazeau |
Je suis d’accord. Il faut le voir en terme de concentration dans les zones agricoles. Il y a des choix à faire. Il y a trop de monde dans l’agriculture. Il faut donc créer d’autres filières, pour reconvertir les gens. Mais ça, c’est pour l’avenir. |
Bernard |
Laisse-moi te taquiner ; tu parles d’autres secteurs, cites m’en quelques uns. |
Cazeau |
Peu à peu, il faudra se lancer dans l’agro-industrie, puis d’autres créneaux industriels. Il y aussi le secteur du tourisme. |
Dimanche |
Vendredi nous avions un atelier sur le Plan National de Sécurité Alimentaire et il y a eu beaucoup de propositions. On a parlé de remembrement des terres, de stratégies de cultures, de développer d’autres filières, comme l’agro-industrie, de création d’autres créneaux avec des spécialisations. On a parlé de gestion intégrée des bassins versants, qui est une priorité, car les bassins versants sont des châteaux d’eau. |
Bernard |
Vendredi j’ai pensé à quelque chose. Vous connaissez ce document qui a été préparé par le Groupe de Travail sur l’Agriculture, avec Paul Duret, Volny Paultre, etc. Est-ce que dans ce document on ne donne pas des indications où on peut faire quel type de culture ? |
Dimanche |
Exactement, ce document donne les potentialités de toutes les zones du pays. Il n’y a plus rien à écrire. Tous est là. Il suffit de passer à l’action. |
Bernard |
Concrètement, quelles perspectives y a-t-il de relancer la production ? |
Cazeau |
Le président Préval, depuis avril, avait lancé l’idée de la relance de la production. Maintenant, avec ces chocs dramatiques, il faut s’en tenir à cette relance, mais pas n’importe comment. Il faut profiter de ces évènements pour tenir compte de la vocation de chaque zone. On ne peut pas relancer la production partout de la même manière. Mais, avant tout, il faut protéger les zones en altitude. Il y aura des zones réservées, des zones agro-forestières, des zones de pâturage, à partir desquelles on pourra développer une agro-industrie : lait, yaourt, fromage, viande. A la CNSA quand nous faisons le bilan alimentaire, notre agriculture ne contribue qu’à 40 % à notre consommation. |
Dimanche |
Nos systèmes de production sont détruits ; il faut s’attendre à ce que notre production tombe à 30 ou même 20 % du panier de la ménagère. L’aide alimentaire va s’accroître. |
Bernard |
J’ai une idée saugrenue. Comme vous l’avez dit, le moment n’est pas à faire des discours. Nous savons ce qu’il y a à faire, mais on ne fait rien, en partie parce que personne ne respecte les règlements. Le parlement vient d’autoriser le gouvernement à décréter un état d’urgence qui lui permet, pendant quinze jours, de prendre les mesures qu’il juge nécessaires. Est-ce que, dans le cas de l’agriculture, on ne pourrait pas déclarer un état d’urgence, mais pas pour quinze jours, pour 15 mois, de manière à ce que le MRNDR dispose de moyens coercitifs pour forcer les choses à se faire comme il se doit ? |
Cazeau |
Je pense qu’il y a un crédit que l’on peut faire à ce gouvernement. On a nommé deux secrétaires d’Etat, à la production végétale et à la production animale. Je pense qu’avec l’équipe en place et avec les déclarations du président, on va mettre le paquet. On doit les prendre au mot. La société civile, les organisations socio-professionnelles, tous doivent contribuer. Je crois qu’on peut prendre la voie qu’il faut, avec la collaboration du Ministère de l’Environnement. Je ne suis pas pessimiste. |
Dimanche |
Effectivement on ne doit pas être pessimiste. Tout haïtien doit se dire qu’il y a un effort à faire car là où nous sommes on ne peut pas aller plus bas. |
Bernard |
Ça ce n’est pas vrai. Depuis que je suis très jeune, et cela fait longtemps, j’entends dire : le pays est tombé si bas, on ne peut pas aller plus bas. Eh bien, je vais vous dire : on peut. J’ai une question de détail. J’ai entendu dire que le gouvernement avait mobilisé 8 milliards de gourdes et que c’est l’agriculture qui avait reçu le plus gros morceau : 2,5 milliards ; combien l’environnement a-t-il reçu ? Car si on n’a pas d’environnement, on n’a pas d’agriculture. |
Cazeau |
Je ne sais pas. Mais on parle d’un pont entre les problèmes conjoncturels et les problèmes structurels, car, si on se contente de gérer l’immédiat, on peut se retrouver dans la même situation. Pendant qu’on règle les problèmes immédiats, on doit jeter les bases de la solution des problèmes structurels. |
Bernard |
René Préval, quand il est arrivé au pouvoir la deuxième fois, a parlé d’une programmation sur 25 ans ; peut-être va-t-il être obligé de le faire maintenant. |
Cazeau |
Il y a des cas où la nature force à agir. |
Dimanche |
Je pense qu’il est extrêmement important de nous entendre sur l’orientation qu’on veut prendre. Et chaque secteur doit donner son apport. Mais il faut aussi des plans annuels, bisannuels, qui doivent mener à ce plan de 25 ans. |
Bernard |
C’est grand défi. Il y a des choix à faire. J’ai l’impression qu’il y a des initiatives qui viennent de l’extérieur et qui répondent plus aux besoins de l’extérieur. Et ce depuis la colonie. Car si on a produit du sucre, c’est parce que les français en avaient besoin pour sucrer leur café. Par la suite, l’introduction de la figue-banane est venue du fait qu’il y avait un marché pour la figue-banane aux Etats Unis. Même chose pour le sisal. Lors de l’atelier de vendredi, je faisais un aparté avec Alain Thermil, même si c’était défendu. Quelqu’un avait dit qu’il fallait que le gouvernement donne ses priorités en matière de production agricole ; et je disais que cela n’avait jamais été formulé formellement, mais que dans les faits il y avait des priorités implicites. Et je citais le cas de la distribution de terre de Salomon, où il était dit que les bénéficiaires recevraient la terre en toute propriété s’ils réservaient une proportion importante à la culture du café et autres denrées d’exportation. La priorité n’est jamais à la sécurité alimentaire de la population. Si on parle d’un plan de 25 ans, il faut décider ce que l’on veut faire. Récemment, on est venu avec cette affaire de bio-carburant. Je ne veux pas en parler trop fort, parce que l’actuel ministre de l’agriculture était très impliqué. Mais j’ai été envoyé par le ministre d’alors chercher des terres pour planter du sorgho sucré, parce qu’un haïtien, installé en République Dominicaine, lui aussi ancien ministre de l’agriculture, avait un projet de production d’éthanol à partir du sorgho sucré à cheval sur la République d’Haïti et la République Dominicaine. |
Cazeau |
On ne peut pas finir l’émission sans une ouverture. La CNSA doit anticiper, mais il faut que tous les intervenants orientent leurs actions. |
Dimanche |
Effectivement, il faut cibler les couches victimes de l’insécurité alimentaire, et nous, dans la section des publications de la CNSA, nous y travaillons et nous souhaitons, par exemple, que tout le monde prenne connaissance du flash alerte qui est sorti cet après-midi. |
Bernard |
Je peux dire que, suite à l’émission avec Gary Mathieu, j’avais pris la décision de donner un résumé, même très bref, de chaque flash info que sortirait la CNSA. |
Dimanche |
Cette fois-ci, c’est un flash alerte, mais la semaine prochaine, on aura le flash normal. |
Bernard |
En tout cas, vous avez ma promesse, dans cette émission on mentionnera les publications de la CNSA. |